Sur le « bon » et le « mal »
Que peut signifier réellement la notion de « bon » ?
Prenons un exemple : Si votre médecin vous dit « il est bon que vous restiez au lit » il serait utile de préciser « bon pour vous » et mieux encore » c’est bon pour vous de rester au lit si vous voulez être rapidement rétabli de votre grippe ». Ce mot « bon » est valable si votre santé est le point le plus élevé dans la hiérarchie de votre intérêt. Il se pourrait qu’une situation d’urgence vous amène à ne pas rester au lit (par exemple : un incendie dans votre chambre). Est-ce que le mot « bon » du médecin n’est plus valable ? Non bien sur, mais il est des circonstances qui veulent que la priorité vitale n’est certainement pas de rester au lit.
Prenons encore l’exemple d’un salarié qui fait des heures supplémentaires. Ces heures de travail en plus (si elles sont rémunérées) sont « bonnes » pour la paye mais « mauvaises » pour la vie de famille et pour la santé. On peut aussi penser qu’une autoroute est « bonne » pour améliorer la circulation, mais « mauvaise » pour les riverains. Nous pouvons encore imaginer qu’un chirurgien puisse faire du « mal » en opérant son patient afin que ce dernier puisse avoir sa vie sauve, ce qui est habituellement considéré comme un « bien ». Le fait qu’une action soit bonne dépend toujours de la totalité des circonstances, des contextes et des situations. Ce sera donc par rapport à une situation relative que nous pourrons tenter de hiérarchiser ce qui semble plus ou bien « bon » dans l’échelle des valeurs.
Ce qui précède pose la question du « bon » ou du « bien » dans la vie de tous les jours, celui du monde relatif. Mais peut-on considérer l’existence d’un bien ou d’un mal absolu ?
D’une manière générale le « mal » est plus facilement et rapidement perceptible que le « bien ». On remarque en effet une certaine asymétrie entre les « bonnes et les mauvaises actions ». Il n’existe que très peu de façon d’agir pouvant être estimées « bonnes » toujours et partout. Curieusement, ce qui est vertu, comme l’amour de son pays, de sa religion ou l’obéissance à son chef est justement ce qui produit les pires tourments, comme les guerres, les persécutions et les génocides. Ce ne sont pas des prostituées, des ivrognes ou des brigands qui ont inventé l’inquisition, la guerre bactériologique ou les famines organisées. Ce sont de respectables théologiens, des savants nobélisables et des patriotes au-dessus de tout soupçon. En outre le « dangereux terroriste » pour les uns, sera considéré comme « un valeureux résistant » par les autres. Et ceci au gré des circonstances historiques, des points de vue dominants et de la puissance des médias.
Nous pensons néanmoins que les « bons » soins des parents envers les enfants sont une chose « bonne ». Dans d’autres domaines, l’impartialité du juge est considérée partout comme une vertu et en temps normal nous apprécions universellement le respect d’une parole donnée. Par contre, il y a des façons d’agir qui sont, indépendamment des circonstances, toujours mauvaises, parce que, par elles, on nie de façon immédiate et définitive la dignité de la personne
Nous pensons que l’assassinat de femmes et d’enfants ne peut jamais se justifier, même en temps de guerre, même en obéissance à un ordre venant de supérieurs, même cet ordre venait directement d’une « révélation divine ».
Nous pensons que la torture par ses parents d’un petit enfant de deux ans parce qu’il fait pipi au lit est définitivement dans le domaine du mal. Nous trouvons la torture mauvaise parce qu’on ne doit jamais torturer un enfant. Cela est valable dans chaque pays, dans chaque culture et dans l’ensemble de l’histoire des hommes et rien ne peut justifier une conduite différente.